La Loire, majestueuse rivière française, a connu au XIXe siècle une révolution de la navigation avec l’introduction des bateaux à vapeur. Cette avancée technologique, symbolisée par des navires tels que « La Loire » et le « Nantais », a engendré une effervescence économique et une concurrence intense entre diverses compagnies fluviales.
Toutefois, malgré les innovations constantes, l’expansion rapide des chemins de fer a éclipsé ces triomphes nautiques, menant à un déclin de la navigation sur la Loire.
Cet article explore l’ascension et la chute des bateaux à vapeur sur la Loire, des prouesses technologiques des constructeurs comme Vincent Gâche aux tragédies marquantes et à l’impact ultime des chemins de fer sur cette ère nautique.
Un premier bateau à vapeur sur la Loire
Le 6 juin 1822, le premier bateau à vapeur conçu pour la Loire, « La Loire », a été inauguré à Nantes. Avec une coque en bois de 25 mètres et une capacité de 250 personnes, il desservait les trajets de Nantes à Paimboeuf et Nantes à Angers. Suite à son succès, d’autres compagnies ont vu le jour. En 1823, le « Nantais » a réalisé la première remontée jusqu’à Orléans à la vapeur.
La Loire, malgré sa majestuosité, présente des défis naturels qui compliquent la navigation, notamment des bancs de sable, des débits irréguliers, des eaux basses et des crues. Toutefois, grâce à l’ingéniosité technologique des constructeurs, majoritairement basés à Nantes, ces obstacles ont été surmontés.
L’un des constructeurs les plus emblématiques était Vincent Gâche, qui s’est consacré à l’amélioration constante des navires. En résulte des bateaux plus rapides et efficaces : le temps de voyage entre Nantes et Angers a été divisé par deux grâce à la mise en service des Inexplosibles. Ces bateaux ont vu leurs machines passer d’une puissance initiale de dix chevaux à vingt-quatre, puis quarante chevaux pour les Inexplosibles, permettant des vitesses allant jusqu’à 26 km/h en descente.
Les avancées ne s’arrêtaient pas là. En 1833, grâce à l’intervention de Thomson, un britannique fournissant des machines à vapeur, les coques en fer ont été introduites, avec le « Vulcain » comme parangon, pesant 14 tonnes avec une longueur de 30,5 m. Ces progrès ont permis aux bateaux de naviguer sur la Loire maritime avec une capacité allant jusqu’à 600 passagers.
En 1834, un nouveau bateau, le « Vulcain », a été introduit avec une coque en tôle plus légère, lui permettant de naviguer même à faible profondeur. Cependant, une tragédie a suivi lorsque le « Vulcain » a explosé à Tours, causant la mort de six personnes.
Les inexplosibles : une innovation technologique

Les Inexplosibles, comme leur nom l’indique, étaient la réponse rassurante de la Compagnie à ces tragédies. Après des explosions meurtrières comme celle du Vulcain n°1 à Ingrandes en 1837 et du Riverain n°1 en 1842, la confiance du public envers les chaudières haute pression s’était érodée.
La Compagnie Générale des Bateaux en fer Inexplosibles de la Haute Loire a été créée, capitalisant sur le brevet « sous basse pression » de Vincent Gâche. L’Émeraude, construit par Gâche en 1837, est le premier de cette nouvelle lignée, suivi par d’autres comme l’Orléanais, la Jeanne d’Arc, et le Nantais. Ces bateaux étaient plus longs, plus puissants et conçus avec une sécurité accrue. Représentatifs de la splendeur de la marine à vapeur de la Loire, ils étaient souvent le sujet des œuvres du peintre Charles Pensée, dont les toiles peuvent être admirées dans divers musées et archives.
Suite à cette série d’innovations et malgré la promesse offerte par la navigation à vapeur, la concurrence féroce entre les différentes compagnies fluviales s’est intensifiée, comme précédemment mentionné, culminant dans les années 1840.
Les chemins de fer sonnent le glas des compagnies fluviales sur la Loire
Malheureusement, l’expansion des chemins de fer le long de la Loire a porté un coup dur à ces compagnies. En 1851, la plupart ont cessé leurs activités, ne pouvant rivaliser avec les trains. L’introduction du train Paris-Orléans en 1843 a précipité ce déclin. Bien que les bateaux à vapeur aient initialement complété le transport ferroviaire vers Nantes et Nevers, l’extension rapide du réseau ferroviaire a réduit leur pertinence.
Malgré les efforts pour revitaliser la navigation sur la Loire, notamment par des projets de canal, les coûts élevés ont empêché leur réalisation. La navigation fluviale, florissante au début du XIXe siècle, a donc décliné et finalement disparu dans la seconde moitié du siècle. Les marins restants ont dû chercher de nouvelles opportunités, souvent liées à la rivière.
Source de l’image à la une : Archives départementales de Loir-et-Cher